Il y a 11 ans -
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Scrum Master Academy – Règle n°2 – Le manifeste agile n’est pas la déclaration des droits du développeur
Voici (enfin!) la suite des règles de la Scrum Master Academy après un mois d’Avril bien occupé me concernant. Pour ceux qui n’auraient pas suivi les nouvelles du French SUG, sachez que les vidéos des sessions du Scrum Day sont maintenant en ligne. Vous pouvez donc y retrouver les règles que Jean-Laurent et moi avons présentées lors de notre session dont voici la vidéo.
La règle n°2 sera une découverte pour beaucoup car nous n’en avons pas encore parlé en dehors des murs de Xebia. C’est une règle qui s’avère polémique à souhait et qui vient en complément de la règle n°1. Nous espérons bien qu’elle fera couler de l’encre dans les commentaires.
Règle n°2: Le manifeste agile n’est pas la déclaration des droits du développeur
En 2012, l’agilité en France est une réalité pour de nombreuses équipes de développement. Beaucoup d’observateurs s’accordent pour dire que la courbe d’adoption de l’agilité a franchi le point critique au delà duquel le sujet devient un courant dominant. A titre d’exemple, l’enquête nationale qu’avait menée le French SUG il y a maintenant 3 ans montrait déjà l’ampleur du phénomène. Les enquêtes régulières menées par l’éditeur de logiciel VersionOne nous éclairent également sur la profondeur de cette adoption au niveau mondial. Cette popularisation entraîne immanquablement une dilution des valeurs et des principes fondateurs parmi la masse des adoptions. Les agilistes de la première heure y voient, souvent à juste titre, une perversion du modèle. Cette dérive est souvent portée par des organisations soucieuses de ne pas se laisser déborder par le vent nouveau qui souffle sur le développement logiciel mais qui ne veulent pas vraiment changer de culture. C’est l’objet de la règle n°1: oublier les valeurs du manifeste conduit à une application faussée de l’agile. Autrement dit faire de l’agile ne signifie pas être agile. Cependant, les strates décisionnelles ne sauraient être les seules responsables de ces dérives. J’observe au sein de certaines équipes agiles l’émergence de comportements qui se réclament de l’agilité mais me paraissent dépasser largement le cadre du manifeste agile. Ces comportements peuvent prendre la forme de combat social – « J’ai le droit de ne pas faire d’heures supplémentaires », ou de lutte des classes – « J’ai le droit de dire Non à mon client », ou encore de plaidoyer pour la sauvegarde des libertés individuelles – « J’ai le droit de choisir mes tâches ». Je force volontairement le trait, mais n’appelons pas « agiles » tous les arguments qui visent à améliorer le confort et le bien-être des équipes de développement. À l’heure de son adoption massive, cela me paraît desservir le mouvement agile plus que de l’encourager.
Il faut reconnaître que le mouvement agile draine dans son sillage un écosystème riche de pratiques manageriales et organisationnelles plus humaines. Ces pratiques tirent leurs inspirations de la psychologie sociale ou de l’observation de systèmes complexes. Les experts agiles piochent allègrement dans ce vivier pour étayer le bien-fondé des principes agiles ou développer de nouvelles approches, comme par exemple: Radical Management, Cynefin Model, Management 3.0. Certains créent même de nouveaux mouvements à part entière, comme le réseau STOOS. Cette démarche, louable pour des experts, ne doit pas faire oublier la nécessaire courbe d’apprentissage pour maîtriser ces concepts. Pour un Scrum Master qui fait ses armes, je lui conseille de rester simple dans son discours et son application des techniques agiles. Si vous venez juste d’apprendre à skier, vous n’allez pas prendre une piste noire (je l’ai fait mais j’étais jeune), vous risquez de vous blesser et de mettre les autres skieurs en danger. Alors je m’adresse à toi, jeune Scrum Master, ne te laisse pas griser par les perspectives d’un lendemain qui chante grâce à l’agilité. L’agilité met les problèmes en lumière beaucoup plus vite, et les problèmes s’appellent souvent « course à la productivité », « manque de budget », « indisponibilité », « visions divergentes », « culture d’entreprise », « décisions des actionnaires », etc. Les réponses à tous ces problèmes sont à chercher ailleurs que dans le manifeste agile. Cette règle n°2 vise à apporter du discernement lors de l’utilisation du mot agile.
A venir: règle n°3 – Le burndown est publié tous les jours après le standup.
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